Les choses humaines

Les choses humaines

Les choses humaines
Karine Tuil

Comme vous l’avez peut-être remarqué, je ne suis pas trop versé dans la littérature contemporaine en ce moment. Mes préférences vont aux ouvrages du XIXe et du XXe siècle parce que je travaille sur cette période.

J’ai tout de même fait une exception avec « Les choses humaines » de Karine Tuil, prix Interallié et prix Goncourt des lycéens 2019. Pas tant par le fait que l’autrice ait obtenu des prix, mais par le sujet traité : le viol. Je vous livre la 4e de couverture : « Les Farel forment un couple de pouvoir. Jean est un célèbre journaliste politique français ; son épouse Claire est connue pour ses engagements féministes. Ensemble ils ont un fils, étudiant dans une prestigieuse université américaine. Tout semble leur réussir. Mais une accusation de viol va faire vaciller cette parfaite construction sociale. »

Les cent premières pages sont consacrées à nous présenter les protagonistes, leurs amants, leurs maîtresses, leurs engagements, leurs préoccupations professionnelles, leurs relations et les liens qui les sous-tendent. Je me suis plutôt ennuyé à la lecture de ce long prologue. Puis vient le viol commis par le fils lors d’une soirée trop arrosée, suivi de la plainte et du procès. Et cette seconde partie est passionnante, car Karine Tuil fait valoir les deux vérités avec brio : celle de la fille traumatisée et celle du garçon n’ayant pas la pleine conscience de ce qu’il a fait. On comprend aussi à quel point il est difficile pour la mère féministe de se positionner, déchirée entre ses engagements et le besoin viscéral de défendre son fils. Et dans cette seconde partie, j’ai réalisé l’utilité de la première partie qui m’avait ennuyé. Car tous les éléments de la vie des protagonistes reviennent sur la scène du procès pour expliquer ou analyser tel ou tel comportement. C’est donc très bien construit. Et s’il devait y avoir une morale à ce livre, c’est que face à la confrontation complexe des deux points de vue, le dogme partisan ne suffit pas. Dès lors, le rôle de la justice devient très délicat et il n’est pas évident de faire la part des choses.

Pour conclure et revenir à un point de vue purement littéraire, je trouve que le livre est correctement écrit, mais je n’ai ressenti aucune émotion des mots. Or, lisant Colette ou d’autres, cette absence de « style » m’a fait défaut. Au final, une très bonne histoire et une écriture moyenne.

jllb