J’accuse

J’accuse

J’accuse
Roman Polanski

J’ai vu « J’accuse », le nouveau film de Polanski. En ces temps de retour de l’antisémitisme, l’idée de traiter de l’affaire Dreyfus est excellente et peut servir de support pédagogique dans les écoles. Certes, j’eusse préféré que le réalisateur fût un autre que Polanski dont la carrière est souillée par des affaires de viol pour lesquelles il n’a jamais payé son dû à la société. Dont acte, et je comprends mes amis féministes qui boycottent ce film et ne supportent pas l’idée qu’un centime de leur bourse aille dans la poche de Polanski.

J’en viens au long-métrage lui-même : la reconstitution historique est parfaite, les acteurs, les décors, les costumes, tout est impeccable. J’ai tout de même quelques critiques à formuler. Des longueurs alourdissent la première partie et, pour ceux qui ne connaissent pas du tout l’affaire Dreyfus, il n’est peut-être pas évident de comprendre ce qui s’est passé et les enjeux que cette bataille a soulevés. La France était véritablement coupée en deux. La haine du juif était profondément ancrée dans une partie de la population et dans les structures sociales et administratives, en particulier dans l’armée.

Le réalisateur a choisi de faire de Picquart le héros principal de son film. Magistralement interprété par Jean Dujardin, on comprend bien son parcours, son obstination à faire éclater la vérité malgré les pressions de sa hiérarchie et sa détestation personnelle des juifs. Du coup, d’autres acteurs majeurs de l’affaire (Zola, le frère de Dreyfus, Labori…) se trouvent en retrait. C’est un choix qui en vaut un autre. En « héroïsant » Picquart, Polanski a voulu rendre son propos plus efficace et surtout plus cinématographique. Car faire un compte-rendu en deux heures d’une affaire qui a duré des années et suscité des milliers d’articles, de livres, de déclarations, était tout de même un challenge. C’est plutôt réussi.

Enfin il manque quelques informations essentielles dans le film. Si Zola a été condamné, il n’a jamais purgé sa peine et s’est enfui en Angleterre pendant un an. Labori n’est pas mort dans l’attentat du procès de Rennes. Esterhazy, le vrai traître, n’a jamais été condamné. Il s’est sauvé (lui aussi) en Angleterre où il a tranquillement fini sa vie sous le nom de « comte de Voilemont ».

jllb