Les 73 jours de la Commune

Les 73 jours de la Commune

Les 73 jours de la Commune
Abraham Catulle Mendès

Ce témoignage du poète et journaliste Catulle Mendès est intéressant, car il montre la Commune vue de l’intérieur par une personne qui ne partageait pas les idées des communards. Il a trente ans en 1871 lorsque les choses commencent à se gâter à Paris. Petit résumé de la situation. L’Empire est tombé avec la défaite de l’empereur à Sedan le 1er septembre 1870. Le 4 septembre, la République est proclamée et un gouvernement de Défense nationale est nommé à Paris avec le général Trochu à sa tête. Le 19 septembre, le siège de Paris commence et dure jusqu’au 26 janvier date de la signature d’un cessez-le-feu et la capitulation le 28 janvier. Une partie du peuple de Paris n’accepte pas cette défaite et se révolte en tentant d’imposer un nouveau gouvernement avec un Comité de salut public. Mais c’est un échec. Une multitude de bataillons de la Garde nationale et de mobiles occupent Paris. Certains sont légitimistes (les mobiles bretons par exemple), d’autres sont carrément révolutionnaires (les bataillons de Belleville et de Montmartre par exemple). Du 1er au 3 mars, les Allemands défilent sur les Champs-Élysées dans une ambiance mortelle, puis ils se retirent.

Le 18 mars, le nouveau gouvernement dirigé par Thiers veut récupérer les canons se trouvant sur le plateau de Montmartre. La population s’y oppose. Le 88e bataillon, chargé de l’opération met la crosse en l’air et sympathise avec la foule. Quatre jours plus tard, la Commune de Paris prend le pouvoir. Le gouvernement légitime se sauve et s’installe à Versailles.

Catulle Mendès nous décrit la situation au jour le jour. Il montre comment la situation est explosive et risque de dégénérer entre bataillons pro et anti-communards. Lui-même est légitimiste et se rallie à l’Assemblée nationale, élue en février, largement rurale et en faveur de la paix. Mais il critique sévèrement l’attitude du gouvernement de Thiers qu’il accuse de refuser toute négociation avec la Commune. Il lui reproche les bombardements de Paris tuant des innocents puis les massacres qui s’en suivent lors de la semaine sanglante.

Catulle Mendès essaye de faire la part des choses entre les extrémistes de la Commune (ceux qui ont procédé aux exécutions sommaires, à l’interdiction des journaux, aux arrestations arbitraires, à la mise à feu de monuments) qu’il rejette et ceux qui sont pétris d’idéal et qui avancent des idées sociales auxquelles il est largement favorable et que le gouvernement de Thiers s’empressera d’enterrer.

Catulle Mendès est un bourgeois républicain de droite, mais à la différence de beaucoup de ses homologues, il a le courage de ne pas quitter Paris pendant l’insurrection. Réfractaire, il refuse de prendre les armes lors de la guerre civile qui oppose versaillais et communards. Arrêté, il est menacé d’être passé par les armes, mais il est libéré, car il s’est présenté sous un faux nom et dispose des appuis d’une partie de sa famille proche du Comité de salut public. Durant la semaine sanglante, il est tout de même réquisitionné pour porter des pavés sur les barricades, ce qu’il fait, contraint et forcé avec la peur d’être fusillé par les versaillais.

Ce livre est l’ensemble de son journal de l’époque, des notes prises au quotidien qui montrent ses enthousiasmes et ses colères. Il fustige et moque l’attitude du peintre Courbet et critique vertement l’écroulement de la colonne Vendôme, symbole de l’empire napoléonien. La destruction idéologique de monuments historiques ou d’œuvres d’art n’est effectivement pas la plus glorieuse des actions de la Commune qui avait pourtant de si beaux projets par ailleurs…

On sent l’admiration qu’il éprouve pour les hommes de la Commune qui vont jusqu’à la mort pour défendre leurs idées et la détestation qui est la sienne envers ceux de son camp qui, comme Thiers, font un usage délibéré et ultra violent de la force pour écraser l’insurrection, rejetant toute tentative de négociation.

jllb