Puis il mourut

Puis il mourut

Puis il mourut
Jeanne Landre
1916

Parfois les livres nous rappellent qu’ils sont plus que de simples pourvoyeurs de caractères. Ils sont aussi des objets uniques et portent les stigmates de ceux qui les ont eus entre les mains. Ainsi cet exemplaire du roman de Jeanne Landre, paru en 1916 en plein conflit et dont une main fébrile a souligné au crayon de nombreux passages. Il contient également deux fleurs séchées et je me plais à croire que celle qui l’a lu (c’est la version de mon imagination, mais peut-être était-ce un homme ?) a sans doute souffert de la séparation d’avec son amant parti à la guerre.

Cette correspondance apocryphe entre une femme et son filleul de guerre n’est sans doute pas le meilleur roman de Jeanne Landre mais il dégage une émotion. Raymonde, belle et encore jeune, bourgeoise, divorcée, décide d’entretenir une relation épistolaire avec un soldat du front, un certain Jacques. Il s’avère que, tout comme elle, il est cultivé, raffiné, sensible et revenu d’amourettes sans lendemain avec des femmes qui l’ont déçu. En l’espace d’un mois, ils vont se découvrir, se mettre à nu et vivre une véritable passion sentimentale et physique sans jamais se rencontrer. Jeanne Landre y déploie sa vision de l’amour, où l’exultation des corps tient toujours une place prépondérante. Mais elle le voit aussi comme une douleur et l’exprime dans les mots de Jacques : « Je ne considère rien de plus grave, de plus sérieux, je dirais même de plus triste que l’amour. Un sentiment profond ne peut être gai, trop de fibres intimes sont prises pour que beaucoup ne correspondent pas à l’élément douleur. »

Jeanne Landre elle-même avait dû en baver pour en arriver à parler de l’amour ainsi…

jllb