Arthur Cravan

Arthur Cravan

Arthur Cravan
BD biographique de Jack Manini
Éditions Grand Angle 208 pages

Je n’ai pas la prétention d’être le seul à m’intéresser aux personnalités oubliées de la fin du 19e siècle, et lorsque je tombe sur la biographie d’un inconnu, je ne manque pas de m’y arrêter. Cette fois il s’agit d’un personnage tout à fait extraordinaire né en Suisse en 1887 de parents britanniques. Il est le neveu d’Oscar Wild et le petit-fils d’un conseiller de la reine Victoria.

De son vrai nom Fabian Lloyd, il entre assez vite en rébellion avec sa famille et à 21 ans, en 1908, il s’installe à Paris et adopte le pseudonyme d’Arthur Cravan. La nature l’a doté d’un physique exceptionnel : deux mètres de hauteur et une carrure d’athlète. Il pratique la boxe, mais se pique d’être aussi poète. Facilement bagarreur, c’est un provocateur né. Il lance sa propre revue, « Maintenant », dans laquelle il tire à boulets rouges sur les peintres et les auteurs de sa génération. Ce qui lui vaut des procès, mais il n’en a cure. Grossier, outrancier, alcoolique, souvent sans le sou, il enchaîne les relations avec les prostituées, mais finit par tomber amoureux d’une Française (qu’il abandonnera tout en continuant de l’aimer). Querelleur, mais pacifiste, il fait tout pour éviter d’être envoyé sur le front lorsque la Grande Guerre éclate. Il traverse l’Europe et se fixe un moment en Espagne où, alors qu’il n’est que sportif amateur, il participe à un combat de boxe contre le champion du monde Jack Johnson qui le met KO au 6e round. Puis il part aux États-Unis où il côtoie de nombreux artistes français du mouvement Dada, dont Breton, Duchamp, Picabia et d’autres. Il participe à la revue « 391 » fondée par Picabia et on le considère comme un inspirateur du dadaïsme.

Continuant sa vie de patachon, il fait la connaissance de la poétesse Mina Loy (qu’il ravit à Duchamp) dont il tombe follement amoureux. Ils se marient à Mexico où le couple a fui car les États-Unis sont entrés en guerre à leur tour. Ils décident de partir ensuite séparément pour l’Argentine où Mina Loy doit accoucher. Arthur aurait embarqué à part sur un bateau devant rallier Santa Cruz, mais qui n’atteignit jamais son but. On finira par le déclarer disparu en mer, mais des doutes planent sur sa mort : aurait-il été abattu lors d’une rixe ? La police mexicaine fait état d’un corps de grande taille retrouvé près de la frontière.

Le dessinateur Jack Manini, lui-même boxeur, a consacré plusieurs années de sa vie à faire des recherches sur Arthur Cravan et sa BD de plus de 200 pages est une éblouissante mise en scène du personnage tout en contraste : bagarreur et pacifiste, poète et provocateur, séducteur impénitent et amoureux transi…

jllb