Au pays des Bamboulas

Au pays des Bamboulas

Au pays des Bamboulas
Dessins d’Albert Mourlan
Capendu Éditeur 1918

Encore une rareté, chinée dans un vide-greniers. Cet album, digne représentant de la période colonialiste la plus noire (si je puis dire…) est intitulé « Au pays des Bamboulas ». Pas de date de parution, pas de nom d’auteur affiché, juste le nom de l’éditeur : A. Capendu. Celui-ci est répertorié sur le site de la BNF comme éditeur d’albums d’images pour la jeunesse. Il aurait officié entre la fin du XIXe siècle (aux alentours de 1890) et le début du XXe (vers 1920).

À la foire aux vieux livres de San Francisco en 2011, un revendeur australien a mis à la vente un poster publicitaire de la couverture du livre pour 450 $. Il en situe la parution en 1918. On peut supposer que l’album est paru juste après la Grande Guerre.

Le livre est composé d’une quarantaine de pages alternant du texte illustré (page de gauche) et une planche complète (page de droite) dont le style de dessin n’a rien à envier à celui d’Albert Dubout ou de Benjamin Rabier. Certaines planches sont signées « Albertmourlan », d’autre « A. Lanmour » (le verlan du nom de l’illustrateur).

J’ai trouvé quelques informations sur Albert Mourlan. Le site cinearchives.org présente une courte biographie de ce personnage. Né en 1887 et disparu en 1946, il est présenté comme peintre, illustrateur, cinéaste autodidacte et… fabricant de jouets ! Il a tourné 55 films dans l’entre-deux-guerres sur des sujets de commande (armée, agriculture, santé et, surtout, promotion de nombreuses municipalités…)

Des bobines de film ont été retrouvées dans la cave de la maison familiale à Montfermeil par sa petite fille, Véronique Mourlan. Elle les a confiées aux Archives françaises du Film, seules habilitées à restaurer les pellicules en nitrate de cellulose.

« Les châteaux du bonheur » est un film réalisé en 1936 sur les colonies de vacances de la municipalité communiste de Gennevilliers. Apparemment, Albert Mourlan a beaucoup travaillé pour les municipalités communistes dans les années trente. Onze films ont été restaurés et sont exploités par Ciné Archives. Certains sont en ligne sur le site : https://www.cinearchives.org/Collections-et-depots-Albert-Mourlan-707-603-0-0.html

Mais sur sa carrière de dessinateur : rien. L’album que j’ai déniché (et photographié pour vous) est introuvable sur les sites de livres anciens. C’est donc une rareté à sauver pour la postérité.

L’histoire nous conte les aventures d’Eudoxie et Phyloxène Poulégrat, deux retraités de la vente de volailles qui entreprennent un voyage au pays des Bamboulas où leur neveu Amédée a effectué ses obligations militaires dans la coloniale. Il leur arrive toute sorte d’aventures burlesques. En dehors de la vision raciste du colonialisme de l’époque, le récit est bon enfant et humoristique. Les planches dessinées sont de belles factures, le trait d’Albert Mourlan est dynamique et sa composition pleine d’invention. (Décidément, les « Albert » ont un don pour le dessin : Albert Dubout, Albert Uderzo…). Bref si on ne s’arrête pas à l’aspect raciste (très courant à l’époque, pensez à « Banania »), il y a là un petit chef-d’œuvre qui mérite d’être rappelé à la postérité.

J’ai tout numérisé. Je vous en propose quelques planches ici.

jllb