Bagage à la consigne

Bagage à la consigne

Bagage à la consigne
André Lang
Gallimard 1960

J’ai acheté ce livre de souvenirs d’André Lang (1893-1986) parce qu’il était le cousin de Lucienne Marfaing (1888-1919), écrivaine connue sous le pseudonyme de « Jeanne Marais », dont je suis en train d’éplucher l’œuvre complète. Œuvre assez courte puisque Lucienne (j’en ai déjà parlé dans des articles précédents) s’est suicidée à l’âge de 31 ans. Une petite phrase de la fiche Wikipédia de Lucienne m’a mis sur la voie : « Son lointain cousin André Lang, dans “Bagage à la consigne” dit qu’elle a été influencée par Jean Lorrain vers ses 16 ans, époque à laquelle elle écrivait dans les journaux niçois. »

Effectivement, les 35 premières pages de ce livre sont consacrées à Lucienne Marfaing avec qui André Lang a entretenu des rapports étroits. Il avoue même qu’elle aurait souhaité qu’il fût son amant, mais qu’il ne sauta jamais le pas… (Je mettrai bientôt ces 35 pages en ligne pour ceux qui, comme moi, s’intéressent au cas de Jeanne Marais/Lucienne Marfaing).

Et puis, comme ce livre était plutôt bien écrit, j’en ai poursuivi la lecture. Dans une première partie, André Lang y raconte sa jeunesse, sa carrière de journaliste-écrivain-auteur de pièces de théâtre. Dans une seconde partie, il décrit comment il a vécu la période de la Seconde Guerre mondiale et comment, en tant que juif, il a perdu tous ses boulots et il a dû se cacher. Enfin, en conclusion, il développe une petite thèse sur l’éducation des enfants : une période primordiale pour éviter que les théories du fascisme puissent s’ancrer dans des cerveaux trop malléables ignorant le sens critique.

On commence donc, dès 1919,  par suivre l’ascension d’un jeune auteur, manquant un peu de culture, mais plein d’enthousiasme, qui parvient (entre autres grâce aux relations de sa cousine Lucienne) à faire ses premiers pas dans le monde du journalisme et dans le marigot littéraire. Il décroche des chroniques dans différents journaux : Les Annales (dirigées par Adolphe Brisson), Gringoire (dirigé par Horace de Carbuccia) puis, plus tard dans le Figaro. Débutant comme critique théâtral, il fait la connaissance de Lise Clémenceau, la nièce du « Tigre » qu’il épouse en 1920. Ensemble ils ont un fils, Gérard, né par césarienne. Mais Lise ne se remet pas de cet accouchement difficile et meurt quelques semaines plus tard. Dès lors, l’éducation de son fils et ses relations avec lui vont être compliquées et tendues d’autant que, connaissant des difficultés financières avant la Seconde Guerre mondiale, Lang tape dans le pécule financier que sa première femme avait légué à son fils et qu’il devait lui remettre à l’âge de dix-huit ans. Sans jamais couper les ponts, Gérard lui reprochera tout de même cet acte de trahison, mais les deux hommes finiront par se réconcilier.

En 1939, André Lang qui est alors directeur littéraire des Éditions de France (maison d’édition appartenant à Horace de Carbuccia) fait la connaissance d’une jeune hongroise venue à Paris dans le but de se faire éditer : Sari de Megyery. Grâce à lui, elle publiera quelques livres qui connaîtront plus ou moins de succès. Il se marieront dès le début de la guerre, alors que les amis de Sari lui déconseillent d’épouser Lang qui est juif. Étrangement, André Lang ne parle pas du tout du passé de sa seconde épouse. Curieux comme je suis, je me suis intéressé à elle et j’ai appris qu’elle avait été actrice de films muets en Hongrie sous le nom de « Sacy von Blondel ». D’une grande beauté, elle avait épousé un metteur en scène de cinéma, très jaloux, qui finit par se suicider. Elle était donc veuve et malheureuse lorsqu’elle rencontra Lang…

La seconde partie du livre est intéressante, car elle montre comment, en période d’occupation, se sont comportés ceux que fréquentait André Lang dans son travail. Certains l’ont soutenu coûte que coûte pour l’aider à survivre. D’autres, comme son patron Horace de Carbuccia, l’ont carrément laissé tomber, refusant de lui verser d’une façon ou d’une autre le moindre centime d’indemnité après son licenciement imposé par les nazis.

Enfin, la conclusion sur l’éducation des enfants est pétrie de bons sentiments, mais très gnangnan.

André Lang a connu un certain succès théâtral et littéraire des années vingt aux années soixante. Puis le public et les éditeurs se désintéressèrent de lui et il finit sa carrière comme journaliste au Figaro.

Je vous joins quelques photos de « Sacy von Blondel », alias « Sari de Megyerey », la seconde femme de Lang, à l’époque où elle était actrice en Hongrie…

jllb

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