Claudine à Paris

Claudine à Paris

Claudine à Paris
Colette

Deuxième épisode des aventures de Claudine. Je serai tenté de la qualifier de « coquine » pour la rime, mais non, décidément, ce terme ne lui convient pas. Car dans le fond, elle est sérieuse dans sa quête d’amour et de sensualité.

Cette fois, Claudine et son père emménagent à Paris, rue Jacob, non loin des bibliothèques où il peut consulter à sa guise des ouvrages savants afin d’avancer ses travaux d’études sur les limaces.

Claudine regrette Champigny, la nature, les bois, les noisetiers, les oiseaux… Son école aussi et ses camarades qu’elle menait à la baguette. Il lui faut du temps pour s’adapter à la capitale. Elle a emmené sa chatte Fanchette et Mélie, la plantureuse bonne qui passe son temps à soupeser ses seins, a fini par céder et les a accompagnés. Elle veille sur la petite qui n’en a guère besoin. Bientôt Claudine sort seule, prend l’omnibus, claque les messieurs qui se permettent de toucher son derrière. Elle est coquette, surveille les changements de son corps, se vêtit à la mode parisienne. Jamais elle n’a été aussi belle, du haut de ses dix-sept ans.

Elle fait la connaissance de la tante Cœur, sœur de son père, qui élève son petit fils Marcel. Or, ce Marcel a l’âge de Claudine. On les présente avec l’idée d’en faire des amis. Ce qu’ils deviennent. Marcel est beau, Marcel est blond, Marcel est intelligent, sensible, raffiné… et Marcel aime les garçons ! Pas comme son père, Renaud (donc le cousin de Claudine), quarante ans passés, grand séducteur de femmes dont Claudine tombe follement amoureuse. Au grand dam de Marcel et pour des raisons que je vous laisse découvrir.

Dans ce second opus, Colette a enfin découvert l’écriture en chapitres. (Le premier volume est écrit d’un seul trait de plume). Cette découpe rend la lecture plus légère, plus plaisante et plus rythmée. L’ouvrage est d’ailleurs plus court. Le style s’affermit, mais le plaisir du récit est toujours le même. Elle nous dévoile toutes les pensées de Claudine et l’on ne peut qu’être effaré devant une telle maturité, une telle intelligence pourtant teintée des affres passionnées de l’adolescence. Une vraie Lolita, cette Claudine qui ne s’en laisse compter par personne. Va-t-elle coucher avec son cousin ? Va-t-elle l’épouser ?
Elle m’a empaumé, j’ai hâte de lire le troisième épisode…

 

Un petit extrait pour la route. Je situe le contexte : Claudine est chez sa tante Cœur qui fait salon et reçoit ses amies pour le thé. Arrive l’une d’entre elles, une certaine madame Barmann que Claudine voit pour la première fois et dont elle fait la description suivante :

« Une boule bossue, auréolée de coton iodé en frisettes, a roulé jusqu’à ma tante Cœur. Embobelinée d’une zibeline attardée sous quoi elle transpire, Mme Barmann est coiffée d’une chouette éployée. Chouette dessus, chouette dessous. Le nez crochu, pour être jaspé de couperose, ne manque pas d’autorité, et les yeux gris en billes remuent terriblement. »

Si ce n’est pas du style…

jllb