Sang
Suivi de Sodome et Gomorrhe
Curzio Malaparte
Étrange ce recueil de Curzio Malaparte qui regroupe dix-huit petits textes dont douze sont consacrés au sang. Malaparte raconte de simples anecdotes de sa vie d’enfant ou de jeune adulte avec une écriture assez fouillée qui mélange longues descriptions (de paysages, d’ambiance) et quelques scènes d’action. Les dialogues y sont rares. Un chien qui vient lécher ses blessures, une fille qui dort et à qui il jette un caillou qui la fait saigner ou bien encore une tragédie entre une chèvre, un bouc et un chevreau copiée sur Phèdre et qui se termine dans le sang…
Dans son introduction en forme de confession, Malaparte dit qu’il a horreur du sang. « Et si certaines de ces pages peuvent paraître cruelles, il faut penser que je ne les ai pas réunies par goût morbide d’images cruelles, mais pour montrer comment on peut, à travers les plus douloureuses expériences, parvenir à une suprême et libre conscience de soi-même, de son peuple et de son temps. » Préface écrite en 1937 et, lorsqu’il parle de la guerre, il s’agit bien de la Première Guerre mondiale à laquelle il a participé et dont il a vu les horreurs qui l’ont marqué à tout jamais.
Certains de ces textes, en particulier les derniers qui ne faisaient pas partie du recueil d’origine n’ont rien à voir avec le sang.
J’ai particulièrement apprécié « Un jour de bonheur », histoire du Cavaliere Bonfante qui, pour la première fois de sa vie, se réveille en retard. Il décide de ne pas aller travailler au cadastre de la mairie où il va s’enfermer chaque jour depuis une vingtaine d’années. Ce dérèglement subit lui fait prendre conscience de l’inutilité de sa vie et de tout ce temps perdu. L’heure est venue de se prendre une bonne cuite et de s’interroger sur l’avenir…
Enfin je n’ai pas du tout aimé « Sodome et Gomorrhe », fable surréaliste qui fait se rencontrer un voyageur (le narrateur) et Voltaire (le philosophe) qui roule en Ford. Les deux s’approchent de Jéricho puis de Sodome et Gomorrhe. Deux anges leur conseillent de s’enfuir sans se retourner. Totalement loufoque, ce texte ne m’a pas touché du tout…