Rage against the machisme

Rage against the machisme

Rage against the machisme
Mathilde Larrère

Editions du détour — 18,90 €

Voilà le livre que j’espérais (sans le savoir) sur l’histoire du féminisme, de ses débuts à aujourd’hui. Mathilde Larrère est une jeune historienne, mais son écriture n’a rien d’universitaire et son style n’est pas ampoulé. Au contraire, elle interpelle le lecteur (ou la lectrice, me fait remarquer une amie), s’emballe ou s’énerve selon les situations et rend son message terriblement vivant.

L’ouvrage est architecturé en chapitres assez courts et truffé de jolies petites illustrations (de Fred Sochard) et de slogans féministes qui en font un objet à part et très agréable à parcourir.

Elle démarre fort dans la radicalité d’aujourd’hui et, en tant que « mecs », on en prend un peu plein la tronche. Mais rapidement le récit passionné et passionnant cède la place à l’invective et on suit avec bonheur les luttes des femmes et leurs conquêtes. Conquêtes qui furent laborieuses tant le patriarcat s’est ingénié à leur mettre des bâtons dans les roues et à les renvoyer à leurs casseroles chaque fois qu’il le pouvait.

Mais enfin, petit à petit, elles ont acquis des droits, d’abord civiques et juridiques : le divorce, le droit d’aller au tribunal, puis le droit de vote, l’indépendance financière et, plus récemment le droit à l’interruption volontaire de grossesse, la reconnaissance du viol et l’égalité femme-homme.

Si beaucoup de ces droits sont inscrits dans la loi, leur application est loin d’être acquise. La lutte continue clairement.

Au fil des pages, on apprend beaucoup comme par exemple l’une des plus anciennes revendications : le droit à porter les armes (pendant les révolutions, pendant la Commune), qui leur a presque toujours été refusé. Elles veulent l’urne et le fusil. On les rejette de la garde nationale.

Après les guerres, le rôle des femmes est minimisé. On refuse même d’inscrire leurs noms sur les monuments aux morts. D’où le fameux slogan lancé par le MLF en 1971 : « Il y a plus inconnu que le soldat inconnu : sa femme ! »

Mathilde Larrère met quelques personnalités en avant, comme Hubertine Auclert, ardente militante pour la révision de l’odieux Code Napoléon et pour le droit de vote des femmes et leur égibilité (nuance). Ou encore Madeleine Pelletier, psychiatre, militante elle aussi, qui s’habillait en homme malgré l’interdiction et qui finira ses jours, persécutée dans un asile.

Les femmes s’organisent sous la IIIe République, créent des journaux, s’expriment, en particulier grâce à Marguerite Durand, fondatrice de La Fronde.

Il faut se battre aussi pour avoir le droit d’étudier comme les hommes : passer le bac et aller en université sont des droits acquis bien tardivement.

Lorsqu’enfin le droit de vote arrive en 1944, l’Assemblée nationale reste un repaire de mâles. (2,3 % de femmes au Palais Bourbon en 1958…).

Puis viennent les revendications salariales, le droit de grève, les luttes des ouvrières, des couturières, des femmes dans les sardineries… L’autrice multiplie les exemples de luttes parlantes.

Aujourd’hui les féministes (femmes et hommes) se battent contre les stéréotypes genrés (le foot pour les garçons, les poupées pour les filles), pour que les femmes puissent disposer librement de leur corps et s’habiller comme elles le veulent sans avoir peur de sortir. Le viol conjugal est dénoncé. Le harcèlement est combattu et le mouvement « #MeToo » a libéré bien des paroles. Certes le féminisme est pluriel et toutes ne sont pas d’accord sur les revendications et la façon de les porter, mais les choses avancent.

Merci donc à Mathilde Larrère pour ce livre qui devrait être distribué dans toutes les écoles (mais aussi dans les bureaux et les bibliothèques). J’ai adoré et dévoré.

jllb