Avant que j’oublie
Anne Pauly
Éditions Verdier
Finalement, passée la couverture, une double page vierge, une autre page avec le seul titre, on arrive à la page 7 où le titre est répété en gros caractères avec la mention « roman » en très petites lettres et enfin, tout en bas, le nom de la collection : « Chaoïd ». Ce dernier mot n’existe pas. C’est un néologisme qui évoque (peut-être ?) le chaos et les androïdes, bref un univers a priori glauque.
Eh bien finalement, tout cela est faux. Ceci n’est pas un premier roman, mais une autobiographie. Et cet univers n’est pas glauque (sauf en apparence), mais plutôt tendre, voire très très tendre.
De quoi retourne-t-il, impatients que vous êtes de savoir ? Le père d’Anne Pauly est mort. Ce grand type unijambiste et alcoolique a pourri sa vie, celle de sa mère (décédée) et celle de son frère Jean-François. Elle nous laisse donc entendre, de prime abord, que ouf, bon débarras. Mais voilà, rien n’est aussi simple et aussi tranché dans la vie. Dans le fond, elle l’aimait plutôt bien son père qui, s’il a cogné sa mère, n’a jamais levé la main sur elle et avec qui elle a toujours entretenu une relation de complicité. Alors au moment d’organiser les obsèques, de vider la maison familiale, l’occasion est belle de remuer la poussière et de chercher sous les apparences. A-t-il toujours été l’affreux jojo des dernières années ? Quelle a été sa vie antérieure et pourquoi est-il devenu ce qu’il était ?
Anne cherche, fouille, farfouille, tempête, pleure, nous émeut et finit par trouver de l’inédit qui va sensiblement modifier l’image de ce père minable en fin de parcours.
Un petit livre, 138 pages, joliment écrit au fil de la plume, dans un langage parlé (c’est à la mode et ça donne un ton de proximité avec le lecteur), pas de chapitres, mais l’ensemble coule bien. Je crois qu’Anne Pauly a décroché plusieurs prix pour ce premier roman qui n’en est pas un tout en l’étant un peu tout de même. Ayant épuisé ce filon de vie familiale, on se demande si elle sera capable de raconter autre chose avec la même facilité d’écriture.
Ah ! j’oubliais. Anne est lesbienne et place dans son récit un beau passage sur la difficulté d’être une militante LGBT. Touchant et bienvenu.