Angèle et Ouistiti

Angèle et Ouistiti

Angèle et Ouistiti
Jeanne Landre
1921

Je continue mon exploration de l’œuvre de Jeanne Landre avec ce texte paru en décembre 1921 sous le titre aguicheur « Angèle et Ouistiti ». Un roman très drôle, utilisant à fond l’argot de Montmartre. J’en arrive à penser que Jeanne Landre est sans doute la première femme autrice à avoir écrit avec talent des histoires d’humour et de sexe et que pour cela elle mériterait d’être auréolée d’une gloire que la postérité s’est refusée à lui accorder. Heureusement, j’y travaille.

Voici le résumé du roman : Angèle Lhomme, poétesse et journaliste, grande femme d’allure un peu chevaline, vit à Paris en compagnie de sa bonne Bretonne, Marie-Sobriété, la mal-nommée, qui l’adore et qui boit comme un trou. Angèle n’a pas les moyens de la payer, tout juste de la nourrir, mais Marie est fidèle et pleine d’admiration pour sa maîtresse. Elle l’aime tant qu’elle s’arrange pour lui trouver un amoureux, car aucun homme ne fait la cour à Angèle. Elle jette son dévolu sur la personne de Gaston Milouzet, employé des P & T, et grand admirateur des poulets poétiques d’Angèle. L’idylle prend forme et bientôt Gaston, surnommé « Ouistiti » par la journaliste, vient poser ses valises dans l’appartement des deux femmes. Passée la période de la passion intense, une routine s’installe. Gaston n’a aucun talent ni aucune prétention. Angèle, plus âgée que lui, se demande s’il est vraiment l’homme de sa vie et que lui restera-t-il d’elle lorsqu’elle aura passé l’arme à gauche ? Elle décide de prendre les choses en main et, par le biais de la Société des Gens de Lettres dont elle est adhérente, elle crée l’association du « Denier des veufs ». Ce qui vexe considérablement Ouistiti. Leurs rapports s’enveniment…

Un vrai plaisir que de se délecter du langage à la fois fleuri et subtil de Jeanne Landre qu’on reconnaîtra dans le personnage principal : Angèle Lhomme. Pas besoin de chercher bien loin : Lhomme = Landre (L’Andros = L’Homme). Quant au prénom Angèle, un coup de « louchebem » et un coup de « verlan » et il se transforme en « Jeanne ». Comme son héroïne, Jeanne a vécu d’articles et de poèmes. Elle était grande, peu jolie, mais portée sur les plaisirs charnels, et elle était adhérente de la Société des gens de Lettres (dont elle sera même vice-présidente). On imagine volontiers que Jeanne ait pu connaître ce genre de relation entre une femme intellectuelle et un garçon insipide qui n’a pour lui que d’être un amant toujours disponible. L’amour, le sexe et la littérature sont les trois thèmes récurrents de cette écrivaine au caractère aussi bien trempé que sa plume.

jllb