Idiss

Idiss

Idiss

Robert Badinter

À l’automne de sa vie, l’homme âgé se tourne vers son passé. Le temps qui a filé entre ses doigts comme l’eau d’une cascade lui paraît si précieux qu’il voudrait assouvir sa soif à l’aune de ses souvenirs. J’aime tendrement ces grands-pères qui parlent de leurs grands-mères.

Ainsi va Robert Badinter, courbant l’échine sous le poids des années (92 ans en 2020). Il consacre un joli livre à son aïeule Idiss, petite juive illettrée originaire de Bessarabie, province roumaine d’Europe de l’Est, soumise à l’Empire russe. L’antisémitisme étant fort développé en ces temps et en ces lieux, Idiss et son mari Schulim accompagnés de leurs trois enfants sont obligés de fuir les pogroms. Ils émigrent vers la France et entament une nouvelle vie. Pour Schulim et ses fils Avroum et Naftout, ce sera la confection. Pour Chifra, leur fille, re-prénommée « Charlotte », ce sera le mariage avec Simon Badinter, jeune ingénieur russe et juif, également immigré à Paris qui va se lancer avec succès dans le commerce des peaux et des fourrures.

Idiss s’adapte et voit avec bonheur s’épanouir sa famille qui n’a qu’un but : l’intégration totale. Pour eux, la France est cette terre de libertés où un homme n’est pas défini par sa religion, mais par sa citoyenneté. Belle résolution qui s’écroulera bien vite avec la montée du nazisme et l’occupation allemande. On connaît la suite. L’auteur nous la raconte dans le détail de sa tragique saga familiale.

Plus qu’une simple biographie, le récit de Robert Badinter montre à quel point un pays féru de grands principes peut tomber dans le gouffre du déshonneur et de l’ignominie et trahir ceux qui voulaient simplement devenir ses enfants.

jllb