Que le diable m’emporte
Mary Maclane
Éditions du Sous-sol — 17 €
Mary Maclane a 19 ans lorsqu’elle écrit ce qu’elle qualifie de « portrait » et qui s’apparente à un journal qui s’étale du 13 janvier au 13 avril 1901. Elle y expose ses états d’âme et sa souffrance. Elle s’ennuie à mourir dans la ville minière de Butte (dans le Montana) qu’elle décrit comme sinistre et sans intérêt. Mais surtout elle se rebelle contre sa condition et s’engage dans un délire littéraire que rien ne limite : elle s’autoproclame un génie hypersensible et incompris et fait de tous ses défauts des qualités. Elle est menteuse, voleuse, déloyale, mais qu’importe puisque le monde qui l’entoure ne lui arrive pas à la cheville. Elle en appelle sans cesse au diable, au mal qui viendra la délivrer de la bien-pensance, de la médiocrité, des conventions. Elle est fière de son corps de jeune fille, de son appétit, de son foie. Elle se dit philosophe ignorée du fond de son trou perdu.
Ce manuscrit, plutôt répétitif, mais pas inintéressant finira par atterrir sur la table d’une éditrice new-yorkaise, Lucy Monroe. Elle le lit en une nuit et décide aussitôt de le publier en 1902. Dans le mois qui suit sa sortie, il s’en vend cent mille exemplaires. Mary Maclane obtient ce qu’elle cherchait : la gloire et l’argent. Gloire éphémère : elle ne connaîtra pas d’autre succès littéraire (malgré son « génie autoproclamé ») et dilapidera sa fortune dans une vie d’excès et de drogue. On la retrouve morte mystérieusement dans sa chambre d’hôtel en 1929, à 48 ans.
Sur le plan littéraire, elle est classée parmi les écrivains « confessionnalistes » : des romans ou des autobiographies intimistes et souvent blasphématoires.
Anecdote : elle tournera dans un film au titre sulfureux : « Les hommes qui m’ont fait l’amour ». Elle y faisait ses confidences (apparemment pas très osées) assise dans un fauteuil en fumant des cigarettes. Le film n’eut aucun succès… et toutes les copies ont, aujourd’hui, (apparemment) disparu.